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lundi 22 octobre 2007
pour qui se prennent certains profs ?
après les 3 ans, les 17 ans. veille du bac en section ‘s’. la philo est une matière marginale, mais qui devrait ouvrir sur le monde et replacer les maths à leur place d’outil merveilleux - mais de simple outil. il ne dit rien sur les fins et il est utile de comprendre pourquoi. or ne voilà-t-il pas qu’une certaine prof, loin de faire la pédagogie de sa matière, noie le poisson sous une déferlante de “corrigés” et autres documents “de méthode” qui sont aussi abscons qu’inutiles ?
est-ce par revanche sur ces élèves matheux qui sont censés “mépriser” la philo comme trop “littéraire” ? est-ce par souci de se faire mousser en jargonnant ésotérique, pour bien marquer l’ignorance des élèves ? toujours est-il que ce genre d’attitude, jamais remise en cause, jamais évaluée par le système, illustre les ravages de certains profs sur des élèves poussés à la compétition. seuls s’en sortiront ceux qui seront aidés par des adultes compréhensifs qui repousseront les p.s ou p.o et les d1 et d2 dits “de méthode” (ouaf ! ouaf !) pour éclairer simplement : comment lire un sujet, comment bien définir les mots, comment argumenter.
bien sûr, personne n’ose rien dire : ni les parents qui craignent que leur enfant soit sanctionné par une prof vexée, ni le mammouth qui passe son temps à concocter des “rapports” sans jamais inspecter personne (quoi, deux fois dans une vie peut-être ?), ni la hiérarchie directe, qui craint bien trop “les syndicats”, ceux-ci crispés sur leurs petits zacquis - comme si bien faire son métier était une intolérable atteinte à l’égalitarisme.
il faut être confronté à la chose pour se mettre en colère. illustrons donc les dérives de certains profs dont j’ai l’exemple sous les yeux.
le jargon : “la problématique est l’ensemble constitué par l’analyse de sens explicite et implicite du préjugé contenu dans le sujet (p.s.), et d’un implicite particulier constitué par ses présupposés, ses implications et ses connotations, et la remise en cause de l’ensemble des affirmations faites pour expliquer ce préjugé (énoncées dans le développement d1) grâce à une série d’interrogations qui permettent de comprendre pourquoi la question contenue dans le sujet se pose.” ouf ! vous n’avez rien compris ? eh bien mettez-vous à la place d’un élève de 17 ans qui va devoir plancher dans quelques mois au bac… il y a un sadisme de l’abstraction et de l’ésotérisme chez certains soi-disant “éducateurs” qui remplace très probablement le fouet d’hier. un sadisme de la phrase à la proust, sans le talent. une prof de philo qui se sent ignorée ou méprisée, se prend pour sartre et pond un “etre et néant” à chaque phrase. bravo la pédagogie !
la noyade : près de 130 pages a4 tapées en caractères times n°10 en interlignes minimum, juste pour faire de la “méthodologie” et “illustrer les sujets”. et nous ne sommes qu’à la moitié du premier trimestre !… qui va lire tout ça, tout comprendre du jargon, et être capable d’appliquer ladite méthode ? ne serait-il pas plus simple de faire des corrigés oraux et de ne donner que le canevas logique du raisonnement sous forme papier ? ah, mais ça ne sera pas “de la faute” de la prof qui aura fait “tout son possible” pour tout dire, preuves écrites à l’appui, parapluie bien ouvert ! sans jamais se mettre à la place de l’élève, naturellement. l’élève est un “objet” qui n’a qu’à subir, n’est-ce pas ? est-ce cela la “neutralité administrative” ? objectiver les sujets - comme on dirait en bonne philo ? bravo la pédagogie !
l’ineptie : un corrigé de devoir est donné à chaque fois en 12 à 13 pages a4 petits caractères et petits interlignes - soit plus de 26 pages manuscrites format feuille d’examen ! est-ce bien raisonnable ? faut-il bavasser comme ça pour rendre un “bon” devoir de philo ? ne faudrait-il pas limiter les corrigés à la moyenne des devoirs effectivement rendus, soit 5 ou 6 pages manuscrites (3 pages tapées) ? s’adresse-t-on vraiment à des élèves de section ‘s’ ? bravo la pédagogie !
les erreurs factuelles : “pascal, dans son livre “pensées” écrit…” n’importe quoi ! pascal n’a jamais écrit un livre qu’il aurait intitulé “pensées”. ce sont des fragments épars, rassemblés par ses éditeurs, qui ont été appelés ainsi. au lieu de jargonner inutilement, pourquoi ne pas appliquer sa propre méthode à soi-même - et être précis quant aux vérités affirmées ?
le blocage : plusieurs pages de “défauts à éviter” empêchent l’élève de se lancer d’emblée. toute action est aussitôt inhibée par la peur de faire ce qu’il ne faut pas - alors qu’il faut d’abord faire et être corrigé pour véritablement “apprendre”. la prof, manifestement, se défausse de sa fonction véritable : elle régurgite un savoir universitaire, elle “n’enseigne” rien. conclusion, l’élève de ‘s’, déjà pas très à l’aise avec les mots, n’ose même plus écrire ni penser qui ne soit “répétition de cours”. les corrections des devoirs sur table le poussent d’ailleurs en ce sens, le conformisme étant largement valorisé et l’originalité bannie. serait-elle prise pour une “attaque personnelle” contre ce qu’a dit le prof ? bravo la pédagogie ! quelle attitude défensive ! quel désir de transmettre ! quelle vocation pédagogique !
j’ai le souvenir, pour ma part d’une prof de philo qui ne se prenait ni pour sartre, ni pour un membre d’élite de la secte des philosophes, ni pour un être tellement supérieur qu’il ne condescende point à s’abaisser à expliquer en mots compréhensibles la méthode qui aide à réfléchir. mais nous ne sommes plus à la même époque, n’est-ce pas ? les vieux profs, dans une vieille société, sont des gens crispés, constipés, aigris. oh, sans doute pas la majorité, allons, mais une trop forte proportion !
comment ne pas comprendre qu’on rêve de remettre au pas ces méprisables méprisants ?
dimanche 21 octobre 2007
petite mathilde
courses avec mathilde, petite fille de trois ans. après un arrêt bonbons, inévitable à cet âge rituel, nous déambulons dans les allées du supermarché pour chercher du basilic. en passant dans le rayon “animaux”, autre arrêt rituel pour observer les petits chats, les petits chiens, les cochons d’inde, les canaris et même les lapins (!) sur les étiquettes des paquets de croquettes, de graines, d’herbes sèches et d’anti-puces. c’est drôle comme les chats ont une bonne tête, on dirait qu’ils sourient. et les chiens ont de grands yeux de dessins animés, rien à voir avec les mastiffs de banlieue qui croquent les petits enfants - ou égorgent les adultes à l’occasion. nous sommes dans l’univers culcul de disney qui voit le monde en rose et le paradis réalisé sur la terre, pour l’instant dans la seule amérique…
pourquoi faut-il que nos marketeurs boutonneux, sortis des écoles ad hoc, imitent cette eau de rose alors que nous savons d’expérience historique, nous européens, que l’existence n’a rien de rose mais a plutôt à voir avec le rouge sang ? les guerres depuis la révolution ne nous ont-elles rien appris ? 1815, 1871, 1914, 1940, 1954, 1962, 1986, 1991, 2003… elever un enfant, c’est aussi corriger cette cucuterie de la pub : dire que le chat peut griffer si on l’embête, que le chien n’est pas une peluche mais peut mordre, que les animaux ont leur caractère, tout comme les hommes, et qu’on doit les respecter pour qu’ils soient amicaux.
etrangement, le rayon “animaux” se termine par de grands paquets où fôlatrent des petits d’homme, tout nus. les paquets de couche suivent les colliers anti-puces… cela en dit long sur la naïveté pratique de nos contemporains, non ? un enfant non élevé griffera, mordra, égorgera. soigner un enfant, ce n’est pas seulement lui mettre une couche ou lui assurer ses croquettes de chaque jour.
au retour, mathilde tient absolument à me lire un livre. ses frères sont partis au foot et elle veut se valoriser.
” a trois ans, tu sais donc lire ?
- …
- alors, vas-y.”
la petite fille va prendre un livre. ce n’est pas un livre d’images, comme je l’avais pensé. c’est un livre pour garçon de 9 ans, qui appartient à son frère.
” - bon, alors, il est à l’endroit ou à l’envers, le livre ?
- ah, tu dois le savoir, c’est toi qui sait lire.
- oui, mais il est à l’endroit, là ?
- non, à l’envers.
- et là ?
- là, ça va.
- bon. je commence. (elle tourne quelques pages) le petit chat, il veut pas se réveiller. sa maman lui dit tu vas être en retard à l’école ! réveille-toi, petit chat. ah, non ! le petit chat veut pas se réveiller. il est pas gentil le petit chat et la maîtresse va gronder. bon. alors. (elle tourne quelques autres pages). le petit chat veut pas s’habiller. met ton pantalon, petit chat, tu vas être en retard. ah, mais, il se dépêche pas le petit chat…” et ainsi de suite.
tout son art est dans le ton monocorde de celui qui lit vraiment. pour qui ne la connait pas, on s’y croirait. il y a les pauses, les silences, la butée sur certains mots. la petite mathilde est, à 3 ans, un acteur de théâtre.
lit-elle ? evidemment non. elle cherche des images dans le livre et invente sur le champ une histoire. une qui correspond à sa vie quotidienne à elle, petite fille. et notamment aux matins où elle traîne pour aller à l’école. elle se projette, elle “joue”. tout comme le font les adultes restés infantiles dans la vie courante.
mais c’est extraordinaire d’observer ce rejeton d’homme être si pleinement “humain”, déjà. on sent les rouages fonctionner dans la petite tête, les ruses se mettre en place pour “faire croire”, la demande d’attention, d’affection, de reconnaissance.
après la victoire du tiers-monde sur les vieux pays (argentine sur la france, afrique du sud sur l’angleterre), dans un sport inventé par lesdits vieux pays (rugby, remake de la sioule), cela fait plaisir d’observer combien la vie continue. et combien elle est belle.
vendredi 19 octobre 2007
la trousse à outils de l’investissement boursier
la vulgate intello française considère la bourse comme un lieu d’orgies où des spéculateurs avides tentent de se remplir les poches en jouant à la roulette. c’est une vision étroite, ignare des choses. un joyeux livre vient de régler son compte à cette conception médiévale de « l’économie de casino », tellement à la mode dans les milieux branchés (et en général protégés).
« les outils de la stratégie boursière » (eyrolles 2007) expose en 327 pages la réalité de ce qu’est un investissement en bourse. ce n’est ni un casino ni la caisse d’épargne, mais une démarche analogue à celle que chacun entreprend pour acheter une maison : savoir pourquoi ? pour combien de temps ? et avec quels moyens ? le livre est écrit par un spécialiste, qui a passé plus de 25 ans à gérer des portefeuilles et des sicav dans presque tous les domaines, y compris les plus pointus, à diriger des équipes de gérants. alain sueur, la maturité venue, y livre avec une certaine jubilation un bilan de métier. car la bourse y apparaît comme un univers passionnant, qui sans cesse bouge et qui oblige à rester en contact avec le monde entier.
les ignorants confondent l’investisseur en bourse avec le « golden boy ». rien à voir ! le matheux de 25 ans, dopé ado aux jeux vidéo et rivé tout le jour à son écran de « trading », n’a rien d’un investisseur. il est plutôt un moderne robot des nouvelles usines que sont les salles de marché des grandes banques. un prolétaire aliéné pour qui tout interlocuteur n’est qu’un « prix » affiché sur écran et dont le seul objectif est le « bonus » annuel qui dépassera de plusieurs fois son salaire déjà confortable. quelqu’un qui, très prochainement, sera remplacé par une machine parce que son métier n’a rien d’humain. a l’inverse, les traits particuliers qui ont fait la fortune des grands investisseurs boursier tels warren buffet ou georges soros « sont des comportement humains, pas des ratios financiers. ils montrent bien que la valorisation d’une société ne se mesure pas seulement dans son bilan, et que ce ne sont pas les méthodes d’analystes financiers qui font la performance. » p.114 en effet, l’auteur excelle dans la démolition critique du « mathématisable » en économie. science qui n’est qu’« humaine », l’économie peut s’aider d’outils de calculs et de probabilités – mais en aucun cas le modèle ne se substitue à la décision ! c’est « ce qui fait le charme du métier ».
professionnels ou particuliers intéressés découvriront que l’investissement comprend les quatre dimensions fondamentales qui animent toute existence humaine, lorsqu’elle est captivante : l’enquête pour trouver l’information, l’intelligence pour la traiter, le savoir-faire technique pour l’utiliser, et enfin le jeu pour aimer cela. tout le contraire de l’homme aliéné par son travail ! le schéma de la page 17 est à cet égard éclairant. le livre se déploie en deux parties : 1/ les outils, puis 2/ comment les utiliser comme les grands.
parmi les outils proposés, cadrer la stratégie boursière sans croire ni les économistes, ni les techniciens, ni les rumeurs, ni les analystes ; suivre les économies avec les chiffres pertinents ; évaluer les marchés en tenant compte des cycles et de la psychologie ; choisir ses actifs en fonction du risque (actions, obligations, monétaire, or, matières premières, immobilier, devises, options) ; construire un portefeuille équilibré pour l’objectif fixé.
mieux les utiliser en étudiant les profils des grands stratèges, warren buffet avec le business model, soros avec la psychologie, peter lynch dans la mondialisation naissante, david baverez avec les “idées” innovatrices ; dépasser les outils en resituant l’investissement dans la mondialisation, en tenant compte des modèles sociaux pour étudier chaque entreprise, découvrir l’importance récente de la géopolitique.
pourfendre les idées reçues est l’un des objectifs du livre : pourquoi l’immobilier n’est pas un « placement sûr », pourquoi le dollar ne vas probablement pas s’écrouler malgré les déficits américains, pourquoi attendre de la banque centrale européenne qu’elle agisse comme la fed américaine alors que son statut n’a pas été voulu pareil, pourquoi analyser dans l’abstrait michelin, toyota ou mcdonalds est inepte, chacune de ces entreprises reflétant le capitalisme particulier généré par la propre société dans laquelle elles sont immergées…
alain sueur est un tenant du long terme et de l’approche « valeur » - comme la plupart des professionnels - pas un spéculateur à la petite semaine. mais il explique pourquoi les grandes banques sont en général allergiques à cette approche. les grandes banques préfèrent par système gérer « la relation commerciale » avec leurs clients – pas leurs capitaux. il vaut mieux, pour cela, aller voir un établissement spécialisé dans « la gestion de fortune ». pourquoi ? par effet de bureaucratie, là comme ailleurs. l’approche « valeur » (acheter pas cher une société délaissée et attendre qu’elle soit revalorisée) n’a pas les faveurs des hiérarchies, qui lui préfère le suivisme de l’approche « croissance » : faire comme tout le monde au même moment pour ne pas s’exposer aux reproches. la mode d’analystes « permet un suivi par processus organisé (ce qui ravit les hiérarchies qui ont l’impression de maîtriser) ; engendre du discours (qui justifie le travail des analystes, l’activisme des vendeurs et meuble le rapport de gestion) ; suscite des mouvements (pourvoyeurs de commissions et de courtages réguliers aux tables de négociation) ; rassure le client (parce qu’il voit des mouvements, il croit qu’on s’occupe bien de lui). » p.107
jubilatoire, vous dis-je !
»
mercredi 17 octobre 2007
peter tremayne, les cinq royaumes
connaissez-vous sœur fidelma de kildare, dont le frère est roi de cashel en irlande, et qui est dàlaigh ou avocat des cours de justice au 7ème siècle ? cette jeune femme, parlant plusieurs langues dont le grec et le latin, a reçu le degré juste au-dessous du plus haut en matières juridiques celtes. et c’est le grand mérite de la série que de nous faire découvrir la richesse préchrétienne de ces royaumes du bout des îles. en irlande, par exemple, la femme était l’égale de l’homme pour maintes choses, le divorce était possible et les prêtres chrétiens pouvaient encore s’y marier. rome n’avait pas encore étendu sa loi et ses moeurs méditerranéennes jusque là.
peter tremayne est le pseudonyme de l’érudit anglais peter berresford ellis. ses origines sont pleinement celtes mais éminemment mélangées entre bretons, irlandais, écossais et gallois, ce qui explique sa passion pour ce monde d’avant rome. il a créé le personnage de sœur fidelma pour le faire connaître, sous la forme pratique et stimulante du ‘whodunit’ (who done it ? ou « qui l’a fait ? »), cet art du roman d’enquête où les anglais sont passés maîtres depuis agatha christie au moins. sœur fidelma n’a pas froid aux yeux. outre son érudition, et sa foi chrétienne, elle a grand sens de la justice et elle sait se défendre. elle pratique assidûment ces disciplines druidiques qui disparaîtront bientôt sous la férule catholique et romaine : la méditation et le combat à mains nues. mais c’est bel et bien ses « petites cellules grises » qui sont son maître atout.
« absolution par le meurtre » avait l’unité de lieu et de temps classique d’une abbaye où un synode religieux allait décider du ralliement à la règle de rome de communautés ecclésiastiques irlandaises et saxonnes. « le suaire de l’archevêque » se passait à rome, dans les palais du pape, alors valérien. cette troisième enquête sur une série provisoire de quinze, se passe au sud-ouest de l’irlande, dans cette partie sauvage qui a conservé encore de nos jours les traditions historiques les plus anciennes. les îles skellig, escarpées, sauvages, occupées par des moines qui fuient le monde et les femmes sont au large, la côte est découpée par la mer, le roc creusé de caves, la terre verte de prés à moutons.
c’est en cet endroit sauvage, tenu par des clans qui font allégeance à cinq rois, que des monastères maintiennent le savoir et la discipline. l’abbaye de ros ailithir est mixte et riche. elle possède surtout une vaste bibliothèque où les manuscrits de parchemin côtoient encore ces baguettes de coudrier gravées de signes en écriture ancienne, l’ogham, que quelques-uns savent encore lire. le vénérable dàcan, irascible mais de grand savoir, y est venu passer deux mois pour étudier l’ancienne histoire des royaumes. mais ne voilà-t-il pas qu’il est assassiné ? et que ce meurtre déclenche une querelle politique pour savoir qui est coupable et, qu’au cas où le meurtrier ne serait point découvert, l’abbé responsable devrait réparation : pas moins que la cession d’un petit royaume ! sœur fidelma se met à l’œuvre sur ordre de son roi – qui est aussi son frère.
ni l’action, ni la réflexion, ni les usages du temps, ni la psychologie humaine, ne seront oubliés. cette enquête est l’une des meilleures de la série et tient en haleine avec art. au fond, ce haut moyen-âge de l’année 665 après notre ère, en irlande, n’était point si farouche.
peter tremayne, les cinq royaumes, 1995, 10/18 2004, 363 pages
suffer little children is a good whodunit, written by an expert in the old middle age of the so celtic eire. sister fidelma is investigating about the murder of an old scholar in a rich abbey. men ambitions, royal inheritance and children massacres, will punctuate action but the truth will in the end be discovered.
mardi 16 octobre 2007
ce fondamentalisme qui nous saisit
ecologie, manger bio, se soigner par les plantes, tests adn, principe de précaution, retour aux valeurs « morales », renaissance du religieux, quête de l’authentique, repli sur la famille et le « mariage » – il me semble que, dans l’air du temps, tout cela soit apparenté. j’appellerais ce mouvement la recherche du fondamental. le socle fantasmé comme un refuge, une plaque solide dans ces sables mouvants du global qui va trop vite. c’est en réalité une régression due à la peur.
tout se passe comme si, sur une mer qui se creuse, les passagers préféraient s’arrimer au bateau plutôt que d’utiliser leur savoir-faire marin pour tenir la barre, sentir le vent et régler les voiles. en bref ils désirent rester passifs, ancrés dans leur identité mythique, au lieu d’être actifs, de prendre leur destin en main avec ce qu’ils sont et ce qu’ils savent.
les sociétés jeunes sont emplies d’énergie, elles vivent le présent avec indulgence et regardent l’avenir avec optimisme ; le passé n’est pour elles qu’un acquis sur lequel bâtir du neuf. a l’inverse, les sociétés vieilles sont fatiguées, elles subissent le présent avec aigreur et tout changement comme une agression, regardant l’avenir avec noirceur ; le passé est pour elles un asile, voire un « âge d’or » regretté. or, si les années post-68 ont eu leur lot d’infantilisme et de dérives anarchiques, elles avaient au moins le mérite d’être d’un optimisme à tout crin, même pendant l’horrible guerre du vietnam, même après les deux crises du pétrole. qu’est-ce qui a cassé ?
je ne sais si c’est l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 ou si c’est le vieillissement démographique, toujours est-il que les deux ont coïncidé. n’évacuons pas quand même la politique. les économistes argan et cahuc viennent de faire paraître un rapport dont le titre a inversé celui d’alain peyrefitte : « la société de défiance ». si le mouvement de moindre optimisme est général dans les sociétés occidentales, plus que les autres la france est touchée.
certes, l’ouverture du monde après la chute du mur de berlin, la conversion chinoise au capitalisme et la réémergence des etats-unis comme puissance mondiale, ont relativisé la place d’un pays moyen comme la france. puissance militaire faible faute de crédits, croissance molle faute de réformes, budget en déficit systématique pour cause de vieillissement, la france a été touchée – mais comme les autres.
or il y a pire : les français ne se font pas confiance entre eux, montrent argan et cahuc au travers de multiples enquêtes. ont-ils confiance en eux-mêmes ? même pas, montre védrine dans son rapport sur la france et la mondialisation.
de quand date ce divorce croissant entre les citoyens et l’etat, les salariés et les patrons, le secteur privé et les fonctionnaires ? « des années 1980 », selon les deux économistes. « mais déjà après 1945 », précisent les auteurs. ils y voient la trace de la lâcheté des élites en 1940 et des dénonciations de clochers durant l’occupation – où l’égoïsme s’appelait « marché noir ». mais l’après 1945 voit aussi cette socialisation corporatiste de la société française qui dresse « ayant droits » contre « exclus » pour un peu tout : sécurité sociale, chômage, accès syndical à certains métiers (ex. le livre), niches fiscales, statuts protégés, etc. la france « classes contre classes » est le pays occidental où la fraude est considérée comme moins « immorale » qu’ailleurs – et où le gauchisme, « cette maladie infantile », fait encore le plus recette. le français est celui qui se méfie le plus des autres.
dans une société de défiance, le pays est une jungle et l’homme est un loup pour l’homme. d’où ces comportements de clans, cette société de cour autour des « célèbres » (qu’ils soient politiciens, footeux, histrions de média ou acteur-chanteur-fêtard), et ce repli sur la cellule familiale. la crainte envers tout ce qui change, tout ce qui vient d’ailleurs, tout ce qui n’est pas reconnaissable, engendre angoisse et comportement de fuite. on réclame des lois, du flic, du contrôle.
que le maïs soit racialement pur et pas manipulé, que les sans-papiers soient analysés adn parce que les faux-papiers circulent trop facilement, que l’économie soit contrôlée parce qu’elle va « dans le mur » ou « de crise en crise ». cela comme si l’avenir n’était jamais autre chose qu’un « pari », comme si tout pari n’exigeait un minimum de confiance en soi. après tout, mettre au monde un enfant, accueillir un étranger, planter de quoi se nourrir, investir des capitaux : mais qu’est-ce donc d’autre qu’un défi à l’avenir ? il faut avoir la foi en sa propre énergie pour supporter de voir croître et s’épanouir un être, une plante, une idée.
il semble que les français n’aient plus cette foi en eux-même, plus de ressort. leur énergie vitale disparaît, leurs comportements sont ceux de vieux, avec ces remugles des années 30 qui remontent même à gauche : chez bové l’anti-moderne, adepte de la pureté génétique des maïs ; chez le foll et les lefollistes qui crient aux chambres à gaz quand on prononce le mot « détail » ; chez les agités de l’extrême qui font de che guevara le néo-christ, pur et sans tache, d’une révolution sans cesse à venir – alors qu’elle est bel et bien venue cette révolution, à cuba, et qu’on voit très bien ce qu’elle a donné ; chez les sectaires religieux, pour qui il faut revenir à la lettre et se garder de tout, réfugiés en ghettos ; chez les parents déboussolés qui en reviennent aux bonnes vieilles méthodes et réclament le b-a ba pour la lecture ou la pension disciplinaire pour les ados.
donc l’époque est au repli, à la crainte, aux repentirs. repentez-vous d’avoir colonisé il y a trois générations ; repentez-vous d’avoir « exploité la nature » depuis le néolithique ; repentez-vous d’être vous, français minables intoxiqués d’etat, dans un monde qui valorise l’initiative, l’originalité, l’individu ! dans la confusion ambiante, les fondamentalismes de tous bords semblent avoir de belles heures devant eux.
alors que l’identité n’est pas honteuse, elle doit « servir » plutôt qu’être un ghetto.
two attitudes facing the future: 1/ to be a sailor using his knowledge to observe winds and drive his boat; 2/ or to be a shipwreck person only able to grasp a piece of wood. it seems that french people are choosing the second way, the passive one. they are afraid of future, afraid of this young new world. they don’t use their knowledge, don’t operate their values; instead, they take refuge in dna genetic, organic food, old education methods and so on.
dimanche 14 octobre 2007
montaigne : « que philosopher, c’est apprendre à mourir »
dans ce chapitre 20 du livre 1er des « essais », michel eyquem de montaigne est tout entier. fils périgourdin d’une époque troublée, emplie de guerres de religion, il vécut de 1533 à 1592. l’œuvre de sa vie, sans préjuger du reste, fut de laisser témoignage. ses réflexions constantes depuis 1571 sont ces « essais » de l’âge mûr qui nous ravissent encore et nous font réfléchir. il s’y est peint lui-même, avec ses contradictions de nature, son impuissance à trouver jamais la vérité comme à rendre bonne justice. l’homme n’est point dieu et l’existence sera imparfaite, toujours, autant l’accepter comme les stoïciens y invitent. les voyages confirment à montaigne la relativité des choses, des mœurs, des jugements. il n’est pas pessimiste, il se veut « sage ». ce qui, en son esprit, signifie réfléchi, donc prudent : tranquille et réglé. la raison, le bon sens, l’expérience, commandent de vivre et de bien vivre, et d’en tirer leçon. ce pour quoi « philosopher, c’est apprendre à mourir. »
la renaissance avait fait revivre l’antiquité, dans les âmes comme dans les œuvres. et les livres étaient si peu répandus encore qu’on en possédait peu. les érudits du temps les lisaient, les relisaient, les méditaient, en apprenaient par cœur des sentences, sans zapper sans cesse comme papillon de nuit. ce chapitre commence donc par une citation de cicéron. nombre d’autres fleurs de rhétorique le parsèmeront encore.
que dit donc montaigne dans cet opus célèbre ?
· que la raison naturelle ne vise naturellement qu’à notre contentement.
· que vivre, c’est bien vivre, « en la vertu même, le dernier but de notre visée, c’est la volupté. »
· que la mort est inévitable par le seul fait que nous soyons né : « faites place aux autres, comme d’autres vous l’ont faite. »
· qu’il est donc vain de la craindre, puisqu’elle est inévitable. « sortez de ce monde comme vous y êtes entré. le même passage que vous fîtes de la mort à la vie, sans passion et sans frayeur, refaites-le de la vie à la mort. »
· autant faire bonne figure et apprécier d’autant l’heure présente. « que la mort me trouve plantant mes choux, mais nonchalant d’elle, et encore plus de mon jardin imparfait. »
· nous ne savons ni le jour ni l’heure, attendons-les partout, car c’est ainsi que naît la liberté. « qui a appris à mourir, il a désappris à servir. le savoir mourir nous affranchit de toute sujétion et contrainte. »
· faisons ce que devons, sans plus attendre, et ne regrettons rien : c’est ainsi qu’une vie sera bien remplie : « tel a vécu longtemps qui a vécu peu ». « il gît en votre volonté, non au nombre des ans, que vous ayez assez vécu. » « où que votre vie finisse, elle y est toute. »
· le cours naturel des ans nous accoutumera à quitter l’existence insensiblement : « le saut n’est pas si lourd du mal être au non être (…) d’un être doux et fleurissant à un être pénible et douloureux » - de l’adolescence sensitive à la vieillesse percluse.
· « il faut ôter le masque aussi bien des choses que des personnes », ce n’est que l’apparat horrifié et chagrin que nous mettons autour de la mort qui nous effraie. or la mort est de nature, traitons-la naturellement.
ce que je retiens de montaigne ?
1. le tragique : ce contre quoi vous ne pouvez rien, inutile de le craindre. c’est vain. faites avec.
2. le bien-vivre : « si vous avez fait votre profit de la vie, vous en êtes repu, allez-vous en satisfait. (…) si vous n’en avez su user, si elle vous était inutile, que vous chaut-il de l’avoir perdue, à quoi faire la voulez-vous encore ? »
3. la liberté fondamentale : qui sait que la fin est au bout, et l’accepte, fera de sa vie ce qui lui semble le meilleur. sans préjudice d’un quelconque « dieu », d’une quelconque « loi », d’un quelconque « tu-dois ». et ce « meilleur » sera celui de toute la tradition humaine sans laquelle il n’est rien.
montaigne was a major french philosopher. he was born in the 15th century, period of civil war in france because of religion. the main opus of montaigne is “essays”. in the chapter 20 of the first volume, the philosopher explains how “philosophise is lesson to die”. you cannot do anything against death, so you have to accept it; during your life time, the better you have to do is to live for the best; with that way, you will be free. it is a lesson for our times.
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vendredi 12 octobre 2007
quand la fête ne fait pas société
une fois de plus, samedi soir, nous allons avoir droit à l’obligatoire grand messe festive de la société moderne : la guerre ritualisée et fort rentable des stades, le tout-people qui fait vibrer en faisant vendre, la grande foire démocratique et populiste du déchaînement de brutes salariés. et voilà le nouveau souverain bien qui submerge les vieilles idées de patriotisme, d’élitisme du sport, de fraternité olympique. nous n’y verrons au contraire que de l’audimat, du jackpot publicitaire et des « analyses » stratégiques des gloseurs patentés. ceux-là vont amuser la galerie pour savoir « ce qu’on aurait dû faire » ou « comment on a si bien réussi ». la télé-commerce a tout l’art de détourner de l’essentiel : la vie quotidienne, l’éducation des enfants, la décision politique. la « fête », rave ou teufeu, est la dysneylandisation permanente du social. où le peuple est sommé d’admirer les people, où chacun - même le plus nul - s’exhibe en direct devant les caméras pour tout dévoiler de son intime. c’est à michel rocard que l’on a demandé si « sucer » était baiser.
le tout-média, le tout-marchand, le tout-festif ont une même origine : le « tout va bien madame la marquise ». surtout plus aucun tragique : la violence n’existe pas, les conflits sont archaïques, l’homme n’est pas un loup pour l’homme. non, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. il suffirait « décoincer » pour que la société soit « heureuse » dans ce néo-paradis des amours toujours et partout. demandez ça aux jeunes des banlieues… oh, mais surtout ne pas faire de différence, c’est « fasciste » ! par exemple mêlez l’adulte et l’enfant. enfin pas trop, c’est à l’adulte de se mettre au niveau de l’enfant – de « bêtifier ». l’enfant n’est pas (encore ?) reconnu comme égal de l’adulte, pédophilie oblige – mais pour combien de temps ? en revanche, mêlez allègrement masculin et féminin, ville et campagne, quais de seine et plage exotique – tout est dans tout, et réciproquement. le bonheur est à ce prix.
l’apparence obsessionnelle, le jeunisme affirmé, la technique-qui-peut-tout, la fête permanente, la pureté revendiquée, la santé portée aux nues, la transparence radicale de tout et de tous, la tolérance pratiquée comme laxisme ou détournement de regard (surtout lors des agressions dans le métro), l’hédonisme égoïste, égocentrique, ego-valorisé, l’indifférenciation de l’ici et du là-bas, des cultures antichoc dans un magma mondialiste, le droitedelhomisme occidental érigé en néo-colonialisme, le recours au pénal envers tout ce qui gêne (y compris le gène par adn dûment testé), l’art contemporain ignare, ego-provocateur, infantile pour la plupart – tout cela veut se constituer en vertu postmoderne. une vertu qui se voudrait « universelle », bien sûr.
eh bien elle l’est - tant qu’elle se vend, le dollar n’a pas de frontières. mais la culture – si. et la culture compte dans la mondialisation. on voit déjà surgir des entreprises venues d’ailleurs, qui rachètent allègrement ces vieux machins que nous avons mis tant de mal à « réformer » et à « restructurer », jamais assez mondiaux pour avoir la taille rentable, jamais organisés pour sortir du microcosme syndico-national. ce fut mittal qui ne fit qu’une bouchée d’arcelor, et les russes qui ont mis un pied dans le golem eads, ou les chinois qui ont failli racheter conoco, le pétrole américain. ces peuples en retard, qui rattrapent la modernité à marche forcée, n’ont pas cette propension occidentale, et si particulièrement française, à dissoudre leur culture dans le « tout-festif » : ils analysent - non pas les matchs - mais leurs intérêts dans le monde ; ils passent du temps - non à jouir en se shootant dans les raves casse-oreilles - mais à travailler pour améliorer leur sort ; ils ne font pas de l’histrionisme télé leur miroir - ils se font beaux par eux-mêmes.
car presque tous - nos politiques, nos médiatiques, nos commentateurs économiques - nient le principe de réalité. pour eux, la nature humaine ne saurait être complexe. tout est simple : « c’est la faute à » et « yaka ».
cette illusion règne de la politique à l’économique, au social, à la technique et jusqu’à l’art très contemporain. jack lang et jacques chirac ont porté l’histrionisme à un point haut, en politique. le relai est pris par ségolène royal et nicolas sarkozy : tout est théâtre et médiatique, rien de ce qui fâche ne saurait se discuter entre adultes, mais être plutôt enrobé de paillettes et reporté à de vagues « débats démocratiques » ou « commissions d’études ». tout le monde sera d’accord à la fin par lassitude, une fois le temps passé. le zapping permanent de l’hédonisme jouisseur – ici et maintenant - est réputé chasser tout seul n’importe quel « problème ». il suffit d’être obstiné, de durer - tout ce que le tropisme d’époque ne sait plus faire. avis aux réformateurs !
car, pour rester les maîtres, il s’agit de faire de l’ego un centre et de « la cité » le nombril du monde. ainsi le veut m. delanoë. ce n’est qu’ainsi, croit-on, que l’on rassurera le bon peuple d’exister. surtout les petits intellos à qui l’on a appris à penser un peu, mais qui n’ont pas de place dans la société, faute de désir social d’investir et de créer. l’individu, à la fois parent, travailleur et citoyen, doit être transformé en mouton fasciné par l’exhibitionnisme, flatté en tous ses désirs, en bref décérébré. chacun le voit : on n’enseigne plus, on fait de l’animation de classe ; on ne travaille plus, on subit les 35 h en faisant « l’éloge de la paresse » ; on n’a plus de débats politiques, on vote pour une performance d’acteur ou d’actrice et l’on obéit aux tabous de partis – qui s’instaurent en gardiens de la morale. seule est laissée à l’individu la jouissance personnelle – et on appelle ça le « moi ».
or l’existence est tragique, on le sait depuis les grecs. les différences existent, nul être n’est semblable à un autre, et c’est pourquoi le voyage, l’ailleurs, l’exploration, l’aventure, les idées, les sexes sont un attrait de l’existence. leurs contrastes font penser, ils « élèvent ». tout comme élever un enfant, planter un arbre ou écrire un livre. car c’est bien cela la vie : l’imprévisible – tout ce que « la fête » tend à abolir lorsqu’elle est érigée en principe permanent d’une société.
neither festivities nor entertainment are able to build any society. tomorrow night, we will have one more a tv entertainment about rugby. but if media men are speaking of patriotism, sport and competition, it will in fact be prime time, marketing and advertising money. it will divert people from today’s problems and give them the games as in the roman empire. i feel it is not the best way to lead a country.
jeudi 11 octobre 2007
andré holleaux, dix ans après
when i was child, then as a teenager, i met a french civil servant who impressed me. member of the resistance and soldier of the general leclerc’s army, andré holleaux was the director of cabinet of andré malraux, the famous gaullist culture minister. in the end of his political life, holleaux began ecologist. not to revolutionize
france but just to preserve the quality of life in local conditions. he gave me the example of an equity man anxious not to overstep the line, listening to others to acknowledge their fineness.
cela fait dix ans qu’andré holleaux nous a quitté à 76 ans pour un monde meilleur, à l’issue d’une longue et douloureuse maladie, comme il est d’usage de le dire dans les milieux feutrés. notre époque de présent immédiat aime à ignorer tout ce qui ne la touche pas ici et maintenant. cette amnésie égoïste a été portée à l’exemplaire par le fameux « mais qui connaît eric besson ? » de la royal candidate. je suis sûr qu’on peut le dire aujourd’hui d’andré holleaux. et pourtant : je l’ai connu assez bien car nous habitions le même village. il est difficile et sans doute présomptueux de dire de lui qu’il fut « un ami », tant la différence d’âge, de trajectoire et de statut était grande. mais enfin…
andré holleaux était conseiller d’etat honoraire, ancien pdg de fr3, enseignant à sciences po, directeur du centre national de la cinématographie française, directeur de cabinet d’andré malraux lorsque ce dernier fut ministre de la culture (1962-65), résistant de l’armée leclerc qui libéra strasbourg. je l’ai rencontré pour la première fois lorsque j’avais 9 ans, lorsqu’andré était venu un dimanche matin après la messe rendre visite à mon père, une visite de notable à notable qui nous paraît bien archaïque aujourd’hui. il se présentait au conseil municipal sur une liste gaulliste et commençait ainsi sa campagne. je l’ai côtoyé régulièrement dès l’âge de 14 ans, lorsque je participais assidûment aux activités du centre culturel qu’il avait créé dans la commune sur le modèle des maisons des jeunes et de la culture de malraux, et dont il était le président. je rédigeais déjà le bulletin du groupe archéologique et m’initiais aux arcanes de la photo. ce n’est qu’une fois adulte qu’andré est devenu « un ami ». il voulait qu’on l’appelât ainsi, façon de faire moins contrainte que sa jeunesse ne le fut, plus en rapport avec l’époque nouvelle.
car andré holleaux, de gaulliste est devenu opposant. d’abord lorsque fut révélée la pratique systématique de la torture durant la guerre d’algérie. ensuite lorsque « les affaires » ont remplacé l’essentiel de la politique, une fois le général de gaulle parti du pouvoir. a tel point que, dès la fin des années 1970, andré holleaux est devenu socialiste, il s’est inscrit au parti. chrétien, il avait une conscience ; social, il ne pouvait cautionner l’affairisme ; mais démocrate, il a souffert de la dérive personnelle et sectaire d’un certain monde mitterrandien. en tant que président de la commission de contrôle des mutuelles en février 1994, ce fut lui qui adressa une lettre d’avertissement à la mnef, que la cour des comptes épinglera quatre ans plus tard. il a donc opté, sur les dernières années de sa vie, pour l’écologie, devenant conseiller régional en 1992. il y retrouvait nombre de jeunes idéalistes qui lui rappelaient ses années de résistance ; un combat pour ce paradis terrestre qu’il est de notre ressort – et localement – d’aménager. c’était là peut-être sa « révolution 68 » à lui, avec vingt ans de retard. nous en avons débattu à plusieurs, un peu amusés de cette conversion de damas, et avec cette intransigeance de l’extrême jeunesse qui lui plaisait, au fond, parce qu’elle le remettait sans cesse en cause. il avait retenu de malraux que « le sens du patrimoine, (est) une manière de placer l’humain dans un grand ensemble dont les éléments agissent les uns sur les autres. » (interview à l’humanité en 1996).
andré était un scrupuleux. il détestait les idées reçues, tout en en étant soucieux de participer au courant majeur de la société de son temps. ce n’était point opportunisme, ni aversion pour le conflit, mais sens de l’écoute et souci d’être juste. avec le recul, c’est probablement la leçon qu’il nous a laissée, à nous les jeunes d’alors, qui sommes désormais la génération mûre. ce scrupule quasi « juridique » de donner à chacun sa place, d’utiliser chaque mot dans son sens, de ne jamais blesser pour être équitable, n’était pas facile à vivre. andré était souvent maladroit dans ses relations affectives ; il avait besoin de mettre à distance pour rester neutre. cette qualité qu’ont les hauts fonctionnaires pour bien servir l’etat devient handicap dans les rapports personnels. difficile d’être naturel et spontané lorsque toute votre éducation fut contrainte et refoulement. mais on ne peut être que de son époque et notre sensibilité de jeunesse l’avait parfaitement compris, ce pourquoi nous nous entendions bien.
qui, « nous » ? eh bien les adeptes de la culture et de la randonnée, les animateurs du centre, les écologistes militants locaux. il avait fondé en janvier 1973 l’union départementale des associations de défense de la nature de l’essonne (udadne) qui comprenait 12 communes et 20 associations. toujours ce souci du terrain, du local, où toutes les idées doivent s’incarner et se pratiquer entre gens qui se connaissent, pour avoir quelque impact. il ainsi en 1979 la « maison de la récupération » pour organiser le tri des déchets recyclables. en 1992, l’udadne devient “essonne nature environnement” (ene), groupe de pression (contentieux, manifestations, pétitions) et force de proposition (formations, conseils, partenariat avec des entreprises) – encore ce souci de l’équité entre le désir et la réalité pratique qui était le cœur de la façon de penser d’andré.
la culture quand elle est appliquée, l’écologie quand elle est locale, la politique quand elle fait vivre la tradition d’un peuple – tel fut l’exemple que nous a donné andré holleaux. ce qu’il a transmis à la jeunesse à sa portée et à ses deux enfants. avec la maturité et le recul du temps, je tenais à lui en rendre hommage.
on peut revoir andré holleaux grâce aux archives de l’ina, écouter sa voix et sa façon de dire, toujours posée, mesurée, pédagogique.
avec jack lang
on peut lire ses souvenirs sur andré malraux et ses réflexions sur la jurisprudence administrative.
il existe aussi un cours sur la politique et la culture à science po, polycopié datant des années 1970.
mercredi 10 octobre 2007
hameçonnage de retour
encore une arnaque !
pour les naïfs ou les gogos qui cherchent un emploi et qui se disent que le canada, après tout, ne serait pas si mal, l’annonce ci-après a tout d’une opportunité.
un rien de bon sens permet de voir qu’il n’en est rien. il suffit de “lire”.
1. comment imaginer que “les” gouvernements américain, canadien et australien agréent une telle société puisque les conditions d’immigration dans chacun de ces pays est très stricte et très différente !
2. le site de la new way consulting international inc n’existe pas. il n’est référencé sur aucun moteur de recherche…
3. le français vacillant et l’orthographe inepte ne font vraiment pas “sérieux” pour une telle société “internationale” de recrutement !
4. le panel des métiers est si impressionnant qu’il ne peut exister autant de spécialistes du recrutement aussi pointus dans aucune des sociétés aussi inconnues que celle-là.
5. le simple fait de proposer des emplois de “service public” à des étrangers (puisque nous sommes en france) fait bien rire. dans chaque pays, il faut être un national pour y avoir accès.
en bref, voici encore une minable opération d’hameçonnage (physing) pour valider votre adresse électronique (si vous répondez), se faire de l’argent par “courrier lu”, ou vous piquer vos codes et autres références si vous avez un mauvais antivirus…
gogos s’abstenir !
de: messagenwc at free.fr
envoyé: mercredi 10 octobre 2007 12:53
À: undisclosed-recipients:
objet: message
agence de recrutement et de placement
new way consulting international inc
email : agence.newwayconsulting at yahoo.ca
agence de recrutement et de placement international agree par les gouvernements americain , australien e canadien.
n° agrement/visa/2316om/29
bureau d’etude : direction_newwayconsulting3006@yahoo.ca
bonjour mesdames/monsieurs
la société “nwc” new way consulting recement inaugurée au canada
recherche une douzaine de
personne a recruter de part le monde entier sans distinctions de sexe
pour l augmentation de personne afin d agrandir son marché qui
communique avec d autres .plusieurs spécialités sont fournies à savoir
:
marketing, marketing communication , droit des affaires commerces
internationale , production agricole , agro-industrie ,
transformation des aliments ménagement de qualité , connaissances dans
les normes de qualités , transports et logique , secrétariat ,
secrétariat de bilingue
, secrétariat informatisé , opérateur bancaire , tourisme ,
hôtelleries , restaurat ions , ingénieurs informatiques , service
publique etc.
alors si vous etes intéressés et que vous avez besoin de plus amples
informations nécessaires , nous vous demandons de prendre contacte
nous à l adresse émail:agence.newwayconsulting@yahoo.ca
franche collaboration
la secretaire
mardi 09 octobre 2007
ce socialisme qui sent mauvais
there is, in france, a part of the left wing which is using of stalinist methods. far from assuming any debate in parliament, the way is to intimidate as the old roman catholic church was doing during inquisition, and as stalin was demanding during the 50s’. this is not an adult label for democracy, in the same time as the left wing would be the only one to be quite ‘democratic’!
selon ‘le monde’, « lors du conseil national de l’ump samedi, françois fillon a estimé que les polémiques entourant l’amendement adn avaient “grossi jusqu’au ridicule un détail” pour finalement masquer “l’essentiel” de la loi sur la “maîtrise de l’immigration”. » un détail, selon littré – la référence de la langue française – est « une partie d’une chose ». la proposition d’utiliser des tests adn est issue d’un amendement parlementaire, elle ne figurait pas dans le projet de loi original : il s’agit donc bien d’une modalité particulière et non pas de l’essentiel. m. fillon est donc parfaitement fondé à appeler cela « un détail ».
trois choses me gênent, dans cette « polémique » dont seuls les français ont le ridicule :
1. qu’un parti ose s’arroger le monopole de la vertu,
2. qu’il préfère l’intimidation intellectuelle au débat démocratique,
3. et le mensonge théâtral à l’analyse critique des arguments.
1. le mot « détail » n’est pas un détail de cette polémique sciemment créée puis entretenue par les professionnels du battage médiatique. il s’agit de remémorer ce que jean-marie le pen avait dit sur les chambres à gaz, “détail” de l’histoire de la deuxième guerre mondiale. la mémoire est positive lorsqu’elle donne de la profondeur au présent et rend conscient des enjeux ; elle est un ressassement sénile lorsqu’elle se contente de répéter, de radoter, de rendre mimétique présent et passé. surtout lorsque soi-même on se « pose » en professeurs de vertu, aptes de par droit divin ou marxisme « scientifique » à donner des leçons à tout le monde. la vertu, ça se prouve en acte, ça ne se décrète pas.
2. dans la plus pure tradition stalinienne, un certain socialisme veut régenter les mots. ainsi, il serait désormais « tabou » d’utiliser le mot « détail » dans quelque contexte que ce soit. déconsidérez l’adversaire, disait l’ex-séminariste géorgien, braqueur de banques à ses heures et devenu, par procès d’intentions et fusillades « officielles », le dictateur. amalgamez, il en restera toujours quelque chose, enseignait son maître goebbels, qui savait y faire. malraux l’avait fort bien analysé dans son ‘adresse aux intellectuels’ du 5 mars 1948 : « ce qu’il faut pour ce mode de pensée, ce n’est pas que l’adversaire soit un adversaire, c’est qu’il soit ce qu’on appelait au 18ème siècle : un scélérat. le son unique de cette propagande est l’indignation ». comment peut-on honnêtement assimiler la contribution d’un amendement parlementaire au négationnisme de la shoah ? c’est comme si l’on avait comparé ségolène royal à adolf eichmann lorsqu’elle avait préconisé de faire encadrer les jeunes délinquants par l’armée. c’est aussi grossier, aussi inexact et issu du même terrorisme de la pensée. en bref le degré zéro de l’intellect, ce que j’ai appelé la « pensée gros bras ». le français a un mot pour ça : « une infamie ».
3. il y a tout un courant socialiste aujourd’hui, au ps, qui n’a rien d’autre à dire en politique. un courant nauséabond qui préfère les règlements de compte aux débats, accuser l’autre plutôt que de se remettre en cause, trouver un bouc émissaire médiatique au lieu de refonder la politique ! a quand une proposition de loi « mémorielle » visant à sanctionner toute utilisation d’une liste de mots fléchés ? alors qu’au contraire, dans une démocratie adulte, aucun sujet ne doit être tabou. le parlement est là pour susciter les arguments des uns et des autres et en débattre pour, à la fin, conclure publiquement. je trouve justement que, sur ce sujet sensible de la biologie des identités, assemblée nationale comme sénat ont jusqu’ici bien joué leur rôle. le débat a été instructif, il a clarifié les choses, il a apaisé les fantasmes. il a notamment établi et justifié la tradition française qui veut que la « nature » d’un être humain soit surtout la « culture » et que les gènes comptent peu, en regard des soins, de l’affection, de l’éducation. « elever » un enfant, ce n’est pas élever un mouton, ayant cherché le meilleur croisement génétique pour qu’il donne plus de laine et de viande ! – pourquoi ne pas le dire publiquement comme cela fut fait ces dernières semaines ? pourquoi refuser d’éclaircir les brumes confortables du fantasme ou lever l’inculture des ignorants ? c’est cela qui est « populaire », bien plus que les anathèmes de vierges effarouchées qui ne font qu’alimenter les chimères d’extrême droite.
bah, c’est de la bonne tactique politique, direz-vous. eh bien non, justement ! outre que nulle fin ne justifie des moyens déshonorants, crier périodiquement « au loup ! » est largement inefficace :
• mitterrand avait déjà utilisé l’affaire de carpentras pour vilipender le front national, sans même attendre les résultats de l’enquête judiciaire. cette enquête a montré que les auteurs de la profanation du cimetière juif n’appartenaient pas au front national, mais étaient des skinheads, ces « gauchistes de droite », dont le parti de jean-marie le pen se méfie avec raison. ce ne fut pas à l’honneur de mitterrand, ni de son entourage, que de cautionner une telle accusation, déniant à ce parti toute opinion démocratique, au nom d’une morale autodécrétée. avec le résultat qu’on sait : une monté régulière et ininterrompue des électeurs du front national !
• puis les mitterrandiens ont cherché à utiliser l’extrême droite contre la droite classique, piège dans lequel jacques chirac (ce qui est à son honneur) s’est bien gardé de tomber. avec le résultat qu’on sait : l’ignoble « 21 avril », jour de deuil au ps puisque le leader socialiste, lionel jospin, s’est trouvé relégué à la troisième place au premier tour des présidentielles. quelle finesse tactique, mes amis ! on ne joue pas avec le feu sans se brûler.
• mais pensez-vous que ces socialistes-là aient appris quoi que ce soit du « 21 avril » ? pas du tout, il est resté un courant très fort en faveur de la « diabolisation » de nicolas sarkozy aux dernières présidentielles. ce candidat était « le pire » pour la france, « le fascisme » à nos portes, les flics dans les rues. « tout sauf sarkozy », on voit ce qu’il en a été : surtout pas royal ! une claire majorité de français en a eu assez de la « moraline » socialiste et a voté largement en faveur du « diable ». ce fut en partie par joyeuse vengeance « populaire » envers ces citadins-professeurs qui composent le gros du ps, en partie pour que « ça change » et que la technocratie d’etat parisienne se cantonne enfin à son rôle – les français ont horreur qu’on leur dise ce qui est « bien » et ce qu’ils « doivent » faire. quant à la tactique : à victimiser l’adversaire on le rend intéressant, et l’on se déconsidère bien plus qu’à proposer une politique concrète. résultat : un ps en ruines, des éléphants parmi les plus populaires qui rallient la majorité « pour servir la france », une candidate déconsidérée, aucune alternative crédible… bravo les artistes !
est-ce un trait d’humour de françois hollande de laisser son directeur de cabinet se laisser aller aux dérives sectaires qui ont fait tant de mal à la gauche depuis 25 ans ? l’humour, il paraît que hollande n’en manque pas, mais de là à laisser faire justement le foll…
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